J’ai eu le privilège d’assister ce mercredi 1er juin au plus grand rassemblement à Paris de l’écosystème Crypto en France organisé par « Finance Innovation » : le « CryptoDay ».
Les tables rondes étaient excellentes, et par plusieurs articles je vous livre mes impressions en commençant par les échanges qui ont eu lieu à propos du Web3.
Reprendre ici le titre de la table ronde résume parfaitement les échanges qui ont eu lieu.
Chacun des intervenants interrogés par le modérateur Monsieur Mehdi Labanni ont été invités à donner leur définition de ce nouveau concept.
Si tout le monde parle du Web3, chacun en a plus ou moins sa propre idée et une définition « universelle » tarde à venir.
Mais un consensus semble se dessiner parce que justement les cas d’usage au travers de « Proof of concept » (POC) révèlent les premiers « Soft Skills ».
Il y a un point sur lequel tout le monde tombe d’accord c’est que le Web3 :
Avouez qu’il y a de quoi nous surprendre.
Nous sommes au cœur d’une révolution profonde (le Web3), et nous serions déjà invités à passer au Web 4 ?
Au commencement fut donc le Web 1 qui a duré de 1990 à 2005.
Sont alors arrivés sur le marché de l’Internet une myriade de fournisseurs d’accès pour construire les canaux permettant la circulation des flux d’information.
Ces nouveaux intermédiaires de l’internet ont bénéficié des nouveaux protocoles informatiques qui ont permis les envois :
Jusqu’en 2005, les services Internet étaient principalement construits autour d’un modèle « client-serveur » dans un sens unique où ces serveurs permettaient le partage de leurs ressources vers leurs clients dans un sens vertical unique « Top Down ».
À partir de 2005 émerge le Web2.0 où l’Internet s’est organisé de manière « Bottom Up ».
Les « clients utilisateurs » des services se sont pris au jeu de partager les ressources du serveur de manière verticale, en participant à des créations de contenus.
Puis de manière horizontale en les partageant avec tous les autres clients connectés au service Internet.
Ce mouvement s’est largement amplifié ensuite avec l’arrivée des « réseaux sociaux ».
Sauf que dans le Web 2.0 si l’utilisateur client a pu à la fois :
Et
Pour autant la « valeur » des infomédiations produites par tous ces multiples « contributeurs-utilisateurs » au sens large, a été captée par le « fournisseur du service » qui par ailleurs a imposé ses conditions d’utilisation :
Tout ce large mouvement « d’échange de contenus » a été rendu possible par la « vélocité » des réseaux entretenus par les « fournisseurs d’accès au sens large » soit les « intermédiaires de l’Internet ».
Donc le Web2 a parfaitement préparé l’émergence du Web3 par la préparation des infrastructures d’un Internet permettant d’échanger rapidement de l’information à moindre coût.
Le Web3 repose sur l’utilisation conjointe de 2 fonctionnalités qui sont indissociables de la technologie Blockchain :
Les intervenants du Web2 ont constaté que l’ancien modèle du « serveur centralisé » n’était plus adapté au monde du « Big Data ».
Le point faible du « serveur centralisé » s’est focalisé sur 2 risques tenant à :
Et
Donc les utilisateurs du réseau ont commencé à expérimenter les réseaux « P2P » reposant sur une architecture informatique distribuée pour permettre d’y déposer les ressources informatiques sur plusieurs « nœuds distincts ».
Cette infrastructure distribuée a été pensée pour fonctionner de manière « décentralisée » apport spécifique de la technologie Blockchain.
La décentralisation s’est donc érigée comme un nouveau modèle de transmission des contenus numériques sans passer par un opérateur en ligne érigée en « tiers de confiance ».
Dans un réseau décentralisé les échanges entre les nœuds reposent sur une administration collective acceptée par tous les nœuds du réseau.
Tous (les nœuds) acceptent le même protocole pour suivre les conditions permettant la mise à jour de la base de données et les échanges de « pair à pair » entre eux.
Ces échanges se font à partir d’une organisation pensée sur une technologie « Trustless » c’est-à-dire que « l’échange des contenus » ne se fait pas par rapport à la confiance vis-à-vis d’une personne.
Dans un réseau décentralisé, on fait confiance à la technologie sous-jacente qui organise le réseau et qui fonctionne sur un système basé sur la preuve.
Pour cela l’échange par un procédé informatique décentralisé peut se faire sans intermédiaire.
C’est une nouvelle organisation de l’infrastructure du Web qui repose sur l’organisation par une base de données décentralisée d’un système de stockage et de transfert des données par le réseau peer-to-peer.
Par les informations de diverses natures stockées dans ses bases de données décentralisées on peut désormais :
Grâce à la Blockchain les Dapps peuvent programmer des Smart contract codés le plus souvent en Solidity sur le mode « hypothèse/conditions » (si- alors/If-Them).
Ainsi en fonction des conditions posées dans l’écriture du Smart contract l’algorithme en lien avec des consultations d’Oracles « off-Chain » peut prendre des décisions et transférer de la « valeur » en peer-to-peer sans duplication.
C’est en cela que le Web3 rend à ses utilisateurs la propriété :
Et
Désormais tout actif numérique (Digital Asset) sur lequel un titulaire peut revendiquer un Droit de propriété ou d’usage peut le tokéniser.
Par tokenisation on peut entendre 2 choses.
Ou le processus d’encryptage des caractéristiques de l’actif sur la Blockchain sur un token pour associer au bien qu’il soit matériel ou immatériel ses caractéristiques.
Ou l’utilisation du token représentant les droits se rapportant à l’actif sous-jacent par :
Mais à terme la mise en garantie des Tokens auprès de banques dans un parcours en « Cefi » (finance centralisée) n’est pas à exclure non plus.
Donc le Web3 est l’infrastructure parfaite qui permet d’échanger de la valeur c’est-à-dire les différents cryptoactifs créés grâce à la technologie Blockchain :
Si la distinction tripartite est simple, la qualification juridique des sous-jacents de ces 3 catégories est porteuse de redoutables enjeux juridiques et fiscaux qui ne sont pas abordés dans le cadre de cet article mais nous y reviendrons.
Se révèle sous nos yeux en direct que la tokenisation peut concerner un nombre d’actifs incalculables notamment pour des actifs considérés jusqu’alors comme « peu liquide ».
Désormais ces actifs peuvent par la digitalisation être divisés, puis tokenisés c’est-à-dire inscrit dans une Blockchain préalable ensuite à échange et/ou une vente.
Sans compter que toute entreprise peut désormais par la tokenisation créer ses propres Tokens qui pourront représenter un moyen de paiement.
Et notamment elle pourra ainsi rassembler autour d’elle ses clients ou communauté par une politique de rewards : (Tokens de récompense, points de fidélité, NFT).
Ou
De Token Génération Event (TGE) notamment dans les campagnes de levée de fond en ICO.
L’irruption dans le Web3 du Metaverse appelle au développement des cryptomonnaies puisque les achats de Lands et/ou espaces virtuels dans les Metaverses se font dans la cryptomonnaie native du Metaverse propriétaire.
Donc si la décentralisation de la Blockchain induit nativement la « désintermédiation » celle-ci restera selon nous relative car on ne peut dans un univers aussi complexe se passer totalement d’intermédiaire ou du moins d’activités servicielles adaptées :
Par exemple pour les achats de cryptomonnaies sur les Cex,
Ou pour l’accès au protocole de financement DeFi 2.0 pour avoir accès à de la liquidité en cryptomonnaie, (Lending, Borrowing, Yield Farming)
De nouveaux intermédiaires vont donc apparaître et s’imposeront nonobstant la décentralisation.
Par contre la différence avec le Web 2 sera organisationnel afin que ces intermédiaires n’organisent pas ou plus la « censure » du fonctionnement des divers protocoles décentralisés.
Des nouveaux cas d’usage qui commencent, la discussion autour de cette première table ronde du CryptoDay du 01/06/22 a permis de vérifier qu’un projet Blockchain doit être pensé et mis en œuvre en s’associant des équipes aux compétences multiples qui voudront partager leurs connaissances au bénéfice du projet.
De même la réussite d’un projet Web3 doit prévoir l’organisation d’une gouvernance transparente sous forme de DAO avec des règles précises et auditable.
Ceci nécessite la rédaction de white Paper et LitePaper lisibles et compréhensibles permettant de vérifier et ainsi d’établir une « métrique de la faisabilité et accessoirement du sérieux du projet » :
Mais surtout tout projet Web3 qui veut réussir doit se construire aussi en association avec l’engagement d’une communauté sur le projet qui va souhaiter valoriser son engagement auprès du projet par des récompenses diverses et attrayantes par l’organisation d’une synergie « Proof of Impact » (POI) avec les interactions en faveur du projet.
Par ailleurs concernant les plates-formes Web3 de contenus comme les jeux vidéo (gaming, Play2Earn), la réussite passera par la transparence des places de marché dans leur White Paper et CGV pour expliquer comment se font les transactions.
Sans oublier leur engagement sur l’interopérabilité des contenus, notamment pour la valorisation des créations par les « utilisateurs joueurs » et la possibilité pour eux de pouvoir valoriser leur actif ou Digital Asset par des reventes sur un marché secondaire.
Enfin l’émergence du Web3 intervient au moment où la gouvernance du consortium W3C qui a fixé les normes d’écriture des pages Web va être profondément modifié à la fin de 2022.
Or développer un site Web3 compatible avec le développement des cryptomonnaies nécessite le respect de normes notamment pour la gestion de la publicité ainsi que la sécurité des navigateurs Web.
Ces normes sont actuellement encore écrites par le consortium W3C.
Il convient donc d’envisager si nécessaire la refonte des sites existants pour les rendre compatibles avec toutes les nouvelles méthodes qui seront fixées par le consortium à destination d’un fonctionnement en Web3 pour :
Cette mise à niveau des sites actuellement conçus pour le Web2 ne sont pas à négliger pour la réussite du projet
Mais surtout la grande différence pour l’éditeur du site et qu’il devra prendre en compte le fait que le Web 3 utilise des application décentralisée ou Dapps qui s’exécuteront sur la blockchain or les applications web3 n’offrent pas les mêmes possibilités que le web2 pour la collecte des données personnelles ce qui changera les modèles économiques.
Ainsi lancer un projet Web3 nécessite de s’entourer d’une équipe aux compétences transversales parmi lesquels sans doute de bons développeurs, mais aussi des experts juridiques et fiscaux pour sécuriser tout le processus de la tokenisation des actifs numériques.
Ce sans compter la vérification préalable de savoir si l’ICO ( Initial coin Offering )ou autre démarche de levée de fond doit être soumise obligatoirement au visa de l’AMF (Autorité des Marchés Financiers) ou s’il est optionnel.
Tout projet Web3 doit aussi s’interroger pour savoir si l’activité de la plateforme la conduira à avoir un statut de PSAN (Prestataires de Services sur Actifs Numériques) qui peut être demandé à titre principal ou optionnel le cas échéant.
Un projet Web3 ne peut donc s’improviser compte tenu des enjeux nombreux qui ont été discutés lors de la table ronde et qui sont résumés pour vous dans cet article.
Le cabinet de Maître Rondeau Abouly peut vous assister dans tous vos projets Web3, pour vos ICO, vos campagnes Tokens (Utilitys Tokens et TGE divers), et pour l’ingénierie contractuelle à envisager pour les nécessaires partenariats.
Le cabinet notamment propose des missions de révision juridique et compliance du contenu de vos white Paper et/ou LitePaper
En effet dans le Web3 tout est nouveau et à construire.
Au début de notre article nous avons précisé que pour certains le Web4 était déjà là.
Le Web4 est employé pour viser le langage « Machine to Machine » par les flux et échanges des données collectées par les objets connectés (IoT) grâce à l’avènement de la 5G.
De ceci nous reparlerons également sans aucun doute ;
Pour les termes techniques employés nous vous invitions à cliquer sur ceux-ci pour être renvoyés (ées) sur nos définitions « Data Literacy » correspondantes.
Article publié le 13 Mai 2022
Véronique RONDEAU-ABOULY
Avocat Blockchain et DPO externe.
La rédaction de cet article a été conçue et organisée pour vous soumettre des informations utiles, des axes de réflexion pour une utilisation personnelle ou à visée professionnelle.
Il est mis à jour régulièrement, mais dans un contexte réglementaire et jurisprudentiel évoluant, nous soulignons que nous ne pouvons être responsables de toute péremption du contenu, ou de toute erreur juridique et/ou inexactitude qui pourrait se révéler en fonction de l’évolution, le lecteur voudra bien considérer qu’en tout état de cause, pour une application personnalisée, chaque cas est unique et que bien sûr, le cabinet reste à votre disposition si vous avez une question précise à poser en lien avec cet article, nous nous ferons un plaisir de collaborer avec vous, n’hésitez pas à prendre contact ou à nous téléphoner.
Mots Clefs :
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